Ne m’être pas trompée

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Un soir de 1984, à tout juste 20 ans, je suis montée sur une scène de conférence pour la première fois de ma vie. Je venais y présenter les bénéfices d’un séminaire de développement personnel à des curieux et des prospects.

Mes parents se trouvaient dans la salle et dans son journal intime du jour, mon père y a inscrit ceci :

« Flo n’est pas faite pour des études intellectuelles, du moins pas pour le moment. Hier soir, nous avons, sa mère et moi, retiré l’impression qu’elle avait de la présence et de l’aplomb. Elle est prête à des efforts réels pour s’occuper des autres et pour trouver un public. Pourquoi pas ? »

Quelle perspicacité. 40 ans plus tard, j’ai fêté mes 60 ans sur la scène du magnifique Théâtre Édouard VII à Paris, devant des centaines de personnes venues écouter le récit de mes périples audacieux. Il y en avait tout autant, installées chez eux, derrière leurs écrans. Ma vie professionnelle préférée est devenue exactement cela. M’occuper des autres, en public.

J’ai finalement fourni l’effort intellectuel requis par des études, lorsque j’ai découvert les champs de la psychologie, qui me passionnent encore à ce jour. Mais je n’ai jamais été appelée par la thérapie ou le soin individuel. Des milliers de scènes plus tard, je peux dire que ma carrière s’est construite sur la joie de sélectionner, interpréter et raconter ce qui peut nous alléger la vie.

J’avais, à 20 ans, écouté une femme conférencière, dont la présence m’avait donné envie d’être un jour à cette place. Cette profession, bien qu’elle porte un nom, n’est jamais répertoriée dans les propositions de formation. Comme si nous n’osions revendiquer une transmission orale. Il est d’ailleurs, en France, recommandé de publier des livres si on veut être écouté. Je m’y suis pliée et m’en réjouis car l’aisance découle, pour moi, d’un travail profond. Hâbler ne me suffirait jamais sans fond.

Mais ce qui a été si différent, 40 ans plus tard, est l’impossibilité que j’ai désormais de ne pas compter sur mon expérience. Le terreau de mes aventures est devenu une matière dans laquelle je peux puiser, au même titre que les récits d’autrui qui m’ont tant happée. Petit à petit, je me suis transformée en matière à récit.

En embrassant lundi dernier ma famille, que j’avais invitée sur la scène pour une fantaisie finale, j’ai été parcourue par l’onde de l’immense satisfaction d’être arrivée à destination.

Et le soulagement de ne m’être pas trompée.

Je suis la seule à savoir combien de virages et dérapages ont été nécessaires pour en arriver là et qu’une vie est à peine suffisante pour trouver sa juste place. Surtout quand elle n’est pas encore finie.

Devenez animateur.trice d’ateliers de psychologie positive
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